Le Ranquet en Vadrouille...Carnet de route.

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Tanzanie, le MV Liemba princesse du lac Tanganyika

Le MV Liemba princesse du lac Tanganyika.

 

 

 

 

 

 

 

 

(M pour Machine et V pour Vapeur). Aujourd’hui, il s’agit de moteurs Diesel.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une fois de plus nous avons eu de la chance. Nous avons réservé au dernier moment  et les 10 « first class cabins » étaient toutes occupées par les Zumgus…

 

 

Il ne restait donc qu’une cabine « VIP » sur le pont supérieur vendue à un prix identique, la belle affaire!

 

 

Plus spacieuse, dotée d’une banquette angulaire et d’une table, d’un accès à un cabinet de toilette avec douche (obligeant toutefois à sortir sur le pont) et surtout de deux hublots, la cabine « VIP » reste un petit bonheur en somme!

 

 

En prime un ventilateur neuf…qui ne fonctionnait pas!

 

 

 

 

Le bateau est Tanzanien, il ne faut pas non plus croire que tout fonctionne!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Seuls cinq blancs effectuaient la totalité de la traversée du lac Tanganyika, les six autres débarquaient en cours de route.

 

 

A l’occasion de notre première traversée du Tanganyika, nous avions fait de bonnes rencontres, la deuxième édition a confirmé la règle.

 

Le premier soir, les zumgus partagent la même table pour le dîner-buffet :

 

Quatre femmes Allemandes quitteront le navire en début de parcours pour Mahale, le parc  National Tanzanien réputé pour la visite des chimpanzés.

 

 

Parmi elles, certaines ont l’âge de la retraite et officient dans l’humanitaire.

 

Ma voisine de table est gynécologue dans la province de Songea près de la frontière Mozambicaine, non loin de la province d’Iringa où travaillait Vincent.

 

Elle me décrit une province abandonnée par les autorités Tanzanienne, ne voulant nullement améliorer les conditions de vie locales, de peur de provoquer un afflux de Mozambicains souffrant d’une situation encore plus difficile.

 

 

 

 

 

À la grande table centrale du restaurant, un jeune couple avec qui nous sympathisons rapidement :

 

Quentin et Anne-Bet, 30 et 27ans, tous deux d’Amsterdam. Ils ont l’âge de nos enfants, nous avons l’âge de leurs parents.

 

Tous les deux ont déjà bourlingué pas mal individuellement, ils sont partis cette fois en couple pour un long périple qui devrait les amener en Inde s’ils ont assez de sous.

 

Le hasard fait qu’ils envisagent d’atteindre l’Afrique du Sud en empruntant un itinéraire très voisin du nôtre, via la Zambie, le Malawi, et le Mozambique…Nous échangeons des informations qui vont s’avérer utiles.

 

 

 Nous confrontons nos points de vue sur le passage au Nord Mozambique qui s’annonce compliqué.

Je leur fais douter de leurs certitudes, mais  leurs remarques  m’amènent à reconsidérer  notre plan initial en Zambie.

 

 

En fait, Quentin et Anne-Bet confirment la crainte que nous avions, à savoir la quasi impossibilité de traverser la Zambie du Nord à l’Est sans passer par le Sud :

 

 

 

Lusaka est donc inévitable.

 

Ces deux jeunes, nous les sentons rompus dans l’exercice du routard au budget limité.

 

Quentin et Anne-Bet  trimbalent une tente leur permettant le camping, c’est un bon plan en Afrique de l’Est.

 

 

 

 

 

 

 

Lors de notre première nuit en Zambie, nous aurons une pensée pour les charmants Bataves sous leur toile :

 

Un violent orage s’est abattu sur la turne qui nous abritait à Mpulungu…

 

Le lendemain, nous les avons retrouvés en ville, la gérante du camping leur avait ouvert un bungalow, la tente prenait l’eau de tous bords.

 

Sur notre parcours nous devrions nous croiser à nouveau.

 

 

Notre voisine de cabine, également « VIP » sans l’intention de le demeurer, Américaine de New- York, s’appelle Danielle et se débrouille pas trop mal en français, ce qui ravit Marie!

 

 

Cette jeune femme habite la 12 éme rue à Manhattan, pas très loin de chez Paul mais côté Ouest.

 

Danielle est journaliste indépendante et fait  un papier sur le MV Liemba, ce bateau mythique qui aura bientôt cent ans.

 

Elle proposera son travail à de grands médias américains en espérant le vendre.

 

 

 

 

 

 

 

 Elle quittera le Liemba au cours de la deuxième nuit, un peu inquiète pour son débarquement qui s’opère au milieu du lac à l’aide de pirogues accostant le navire pour rejoindre la plage.

 

 

 

A n’en pas douter, débarquer du Liemba en pleine nuit pour sauter dans une pirogue, reste une expérience peu banale!  Mais les Africains à bord faciliteront le périlleux numéro!

 

Et puis il y a Titus.

 

 

Un Anglais de la banlieue de Londres, cinquante-cinq ans, deux infarctus, vivant à Kampala avec une Ougandaise, une femme formidable, la meilleure que je n’ai jamais trouvée ! dit-il…

 

Elle est restée à la maison, car Titus a fait charger sa moto chinoise sur le bateau, et à deux sur la bécane, parcourir les pistes de Tanzanie et de Zambie ce n’est pas pratique!

 

 

 

 

 

 

Titus est astrophysicien et s’intéresse depuis peu aux araignées…Tout autant passionnantes que les humains, peut-être plus, ajoute-il.

 

 

Titus aime la bière, la bière Anglaise surtout, la seule qui vaille! Au bar il consomme la bière Tanzanienne, il n’a pas le choix !

 

Il apostrophe vertement  et bruyamment le barman quand la canette ne lui semble pas assez fraîche.

Déjà qu’il accepte de boire « local », il faut au moins que le service suive!

 

 

 

 

 

Mais derrière ses lunettes rondes, c’est un professeur Nimbus qui sait s’adapter, car tôt le matin il décapsule les mousses!

 

Titus a fait peindre sur le réservoir de sa moto une feuille de cannabis, car ça éclaircit les idées affirme-t-il!

 

 

Titus a le profil du « Biker », il aime les tatouages.

 

Sur le pont il profitera de la présence d’une communauté tribale Africaine (musulmane) dont les femmes, traditionnellement, se tatouent des fleurs entrelacées sur les bras.

 

Le temps d’un moment, Titus sera le clou du Liemba lorsqu’il se fera tatouer sur le dos une fleur par une femme Africaine.

 

 

 

 

 

 

Il deviendra un vrai héros quand il obligera la tatoueuse à venir prendre les billets de banque avec sa bouche, Titus les tenant pliés serrés entre ses dents !!

 

Autrement, pas de paiement a décidé Titus!

 

 

 Un exercice difficile pour cette tatoueuse méritant son obole, mais un grand moment de fous rires chez les femmes Africaines.

 

 

 

Titus est un amateur de Bd, il a toute la collection des « Tintin», adore « Tintin au Congo », mais ce qu’il dévore le plus c’est « Astérix et Obélisque ».

 

 

Titus aiment les femmes, toutes les femmes, et se fait parfois démonstratif.

 

Ainsi quand Danielle nous dit au revoir, Titus oublie ses mains sur les fesses de l’Américaine qui semble très peu apprécier le nouveau genre de flegme « so British »!

 

Titus commande des frites et du ketchup qu’il ne mange pas.

 

Il va les donner aux gamins qui s’échappent de la puanteur de la cale pour respirer au premier pont. Des gamins qui ont peu ou pas du tout!

 

Titus a une âme, c'est un bon garçon!

 

 

 

Le Liemba est une expérience hors du commun, la vie à bord est absolument incroyable :

 

De la souffrance endurée par les six à huit cents Africains entassés dans la cale, jusqu’au spectacle hallucinant qu’offrent les accostages des pirogues de jour comme de nuit, le show est permanent, émouvant souvent, inoubliable forcément…

 

 

 

 

 

 

En 2010, j’avais posté un commentaire sur la vie à bord du Liemba:

 

Nous faisions le trajet Sud/Nord de Mpulungu (Zambie) à Kigoma (Tanzanie), sens inverse de celui que nous venons d'effectuer.

 

Je le reproduis ci-dessous en Italique en actualisant les données en gras)

 

Janvier 2010:

 

Le MV Liemba et le Tanganyika, une histoire d’amour :

 

 

C’est une histoire d’Amour entre le Tanganyika et la vieille dame Allemande, le MV Liemba, qui dans les années 50 servit un temps au film “African Queen” (Humphrey Bogart, Catherine Hepburn).

 

 

Le MV Liemba est une ancienne canonnière Allemande construite en 1913 par les chantiers navals de Hambourg.

 

 

 Arrivée au port de Dar es Salam :

Tanzanie/océan Indien, et ensuite transportée en  pièces détachées à dos de mulets et à dos d’hommes, elle fut remontée au port de kigoma sur le lac.

 

 

Depuis elle n’a jamais quittée le Tanganyika.

 

Plusieurs fois coulée pendant les guerres mondiales, la canonnière a été à chaque fois renflouée.

 

 

Le MV Liemba perpétue le mythe de la navigation sur les grands lacs Africains, assurant  une liaison vitale avec les régions les plus reculées du Tanganyika.

 

Les eaux du lac sont limpides et réputées les moins polluées du monde*, abritant un grand nombre d'espèces très rares.

 

 

 Ce n’est pas l’avis de certains pécheurs rencontrés, qui ne savent pas à quoi attribuer la baisse de capture du poisson, et autre phénomène plus inquiétant, une probable contamination saline de ses eaux douces.

 

 

Dominé par les escarpements de la Rift Valley qui viennent mourir sur ses plages, le lac offre des paysages grandioses, on dit aussi que c’est le plus beau lac du monde et “…même si c’est pas vrai c’est quand même peut-être…”

 

 

 

 

À de nombreuses occasions on croit pouvoir toucher les côtes de l’immense Congo (ex Zaïre) tout proche.

 

 

Le MV Liemba  poursuit  sa route en jetant souvent l’ancre, de nuit comme de jour, au large des villages en chapelet qui bordent le lac… (17 arrêts)

 

 

De nombreux villages de pêcheurs paysans bordent les côtes Tanzaniennes du lac.

 

Ces villages sont extrêmement isolés des villes, le Liemba reste donc un moyen de communication, de commerce et d’échange vitale au plein sens du terme…

 

 

 

 

 

 

 

 

Quitter ces villages par la terre, c’est affronter des pistes en mauvais état (totalement inutilisables lors de la saison des pluies), et devoir supporter de longs parcours.

 

Alors des dizaines de petites embarcations robustes et rapides caracolent  vers le navire, pour la plus part à la force de la rame;

 

(C’est moins vrai maintenant, beaucoup de pirogues sont motorisées)

 

permettant à de nouveaux voyageurs de se hisser à bord et de descendre ceux arrivés à destination, sans oublier  les innombrables ballots de poissons séchés.

 

 

 

 

 

 

 

De nuit la scène est spectaculaire, les accostages sont violents, il faut être bien positionné pour pouvoir charger le maximum dans les barques, les coups de rames volent entre pécheurs.

 

 

 

 

C’est une véritable compétition, plus la barque est chargée, plus elle rapporte de sous...les comptes se font sur la plage!

 

 

 Le MV Liemba est déjà loin, prêt pour une autre desserte.

 

Du bateau en plein lac, on ne débarque pas que des vivants :

 

Un Congolais  pris d’un probable malaise fatal, a eu l'idée de suspendre son voyage.

 

En 3 eme classe, c’est à dire dans la cale réservée aux pauvres, pas moins de 600 personnes s’entassent dans une chaleur suffocante, marinant au chaud près de la salle des machines.

 

c’est intenable, toutes les odeurs se mêlent…

 

 

Conserver un corps dans ces conditions est impossible, les frigos sont prévus pour la bière et pas pour la mise en bière!

 

 

Ce Congolais anonyme sera pris en charge par une barque et les pécheurs lui assureront une sépulture au village comme pour l’un des leurs.

 

 

La famille de ce pauvre bougre sera prévenue dans quelques semaines.

Peut-être plus.

 

 

 

Ce soir la pleine lune  éclaire la noire cheminée du Liemba, dans notre cabine les ananas, achetées  le matin sur le pont, diffusent une senteur sucrée.

 

 

Nous dormirons hublots grands ouverts.

 

 

 

 

 

 

 Au matin plusieurs coqs destinés au marché de Kigoma oubliant qu’ils sont sur un bateau , annoncent en fanfare le lever de soleil sur le Tanganyika.

 

 

 Des rencontres toujours surprenantes à bord. Comme la mama Africaine musulmane faisant ses prières régulières entre deux broderies et dormant sur le pas de notre porte.

 

 

On s’en ait fait une copine, elle surveille notre linge qui sèche au bastingage ; elle fait partie des mamas influentes du bateau, du pont supérieur où elle a élu domicile, elle pilote des transactions commerciales dans les différents accostages du navire et ne semble pas supporter la moindre contestation.

 

 

Abonnée du Liemba, connaissant bien le capitaine, elle fait figure d’autorité à bord.

 

 

Outre ses qualités de brodeuse, elle opère à l’occasion :

 

 

Vincent est victime d’un « funza », sac d’œufs d’insectes logé dans un orteil près de l’ongle, contracté peut être en marchant nu- pieds sur la plage.

 

 

Il faut être précis pour ne pas percer le sac, les mamas savent faire.

 

 

 

 Pourtant  habituée à travailler à la lame Gilette, elle acceptera le scalpel que Vincent lui confie, et expulsera la vilaine poche infectée.

 

 

En échange de l’intervention, Marie lui laissera une paire de lunettes de lecture lui facilitant la broderie.

 

Elle apprécie ! Sous les yeux des autres mamas, mama Kashindi en impose en opérant le Blanc!

 

 

 

 

 

 

 

Selon Danielle, la journaliste Américaine, le gouvernement Allemand semblait entamer des démarches auprès de la Tanzanie pour récupérer le Liemba et en faire un musée.

 

En échange, Berlin fournirait un ferry neuf.

 

 

Les dernières transactions sembleraient plutôt s’orienter vers une remise en état du Liemba fortement dégradé, le gouvernement Allemand prenant l’ensemble des réparations à sa charge.

 

 

 

Le capitaine, interrogé par la journaliste, pense que trois mois de travaux seraient nécessaires et devraient débuter d’ici peu.

 

 

 

 

 

 

*Pollution du Tanganyika : voir dans « l’Afrique des Grands lacs » l’article « lac Tanganyika »

 

l'Afrique des grands lacs (sept 2012)

 

 



27/10/2012
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